Au petit matin, la brume qui longe les allées du cimetière des tirailleurs a laissé place à un silence dense. Sur cette terre de Thiaroye où l’histoire se déploie en éclats douloureux, le Sénégal a commémoré, ce lundi 1ᵉʳ décembre, le 81ᵉ anniversaire du massacre de 1944.
Le Président de la République, Bassirou Diomaye Diakhar Faye, a dirigé la cérémonie en présence de son homologue gambien, Adama Barrow, ainsi que de plusieurs représentants d’États africains, dont le vice-président ivoirien Tiémoko Meyliet Koné et le président de l’Assemblée nationale du Togo, Komi Sélom Klassou.
Avant de rejoindre le camp militaire, le Chef de l’État s’est recueilli au cimetière des tirailleurs. Il y a déposé une gerbe de fleurs devant les tombes des soldats tombés sous les balles de l’armée coloniale en décembre 1944. Il a salué « les Chefs d’État et de Gouvernement (…) qui ont dépêché des délégations de haut niveau », tout en déclarant que leur présence relevait d’« une conscience africaine qui s’affirme (…) et d’une volonté commune de rendre à nos peuples la vérité qui leur a été longtemps confisquée ».
Le Président de la République a rappelé le caractère essentiel de ce rendez-vous annuel. Il a affirmé que « la vérité ne s’efface jamais » et qu’elle « finit toujours par réclamer justice ». Le chef de l’État a rendu hommage aux tirailleurs qualifiés d’« héros africains venus de divers horizons ». Il a rappelé que leur exécution avait pour seul motif « d’avoir réclamé le paiement de leur dû, la reconnaissance de leur dignité et le respect de la parole donnée ».
La cérémonie a réuni plusieurs délégations africaines venues rappeler que la tragédie de Thiaroye allait bien au-delà des frontières nationales.
Le Chef suprême des armées a insisté sur cet aspect en déclarant que « si le massacre a eu lieu ici, sur le sol sénégalais, le sang versé fut celui de l’Afrique ». Il a relié cette mémoire commune à « un socle de solidarité panafricaine » et à un engagement partagé pour « bâtir une Afrique qui se souvient de son passé ».
Devant les personnalités présentes, il a salué le rôle du Comité de commémoration, des historiens, des chercheurs et des associations, auxquels il a attribué l’ouverture d’« un dossier longtemps verrouillé ». Il a indiqué que leur travail avait permis d’éclairer « la mémoire refoulée de cette tragédie (…) sous l’éclat de la lumière de l’histoire ».
Le chef de l’État a rappelé l’importance symbolique du pas franchi lors du 80ᵉ anniversaire, lorsque la France avait employé « le mot juste ». Il a déclaré que cette reconnaissance restituait « à l’histoire la part de vérité qui lui avait été amputée ». Il a ensuite annoncé la publication du Livre blanc sur le massacre, un document présenté comme « une référence incontournable pour comprendre Thiaroye ».
Bassirou Diomaye Faye a aussi confirmé la pose de la première pierre de la Stèle commémorative, édifiée entre le camp militaire et le cimetière. Il a précisé que ce monument formera « le cœur d’un vaste ensemble mémoriel » comprenant des espaces éducatifs et culturels dédiés à la jeunesse. Il a annoncé qu’il deviendra « un phare de vérité historique et une citadelle de savoir pour les générations futures ».
Dans son allocution, le Chef de l’État a indiqué que le gouvernement renforcera la place de cet épisode dans les programmes scolaires. Il a évoqué l’exigence de transmettre « les séquences, les acteurs et les récits » afin de consolider la conscience nationale et l’engagement panafricain.
Le Président a affirmé que Thiaroye incarne « la violence du système colonial » mais aussi « la résistance africaine ». Il a évoqué la question des réparations tout en estimant qu’elle devait être posée « sereinement mais résolument », en s’appuyant sur la vérité historique et sur un devoir de justice envers les familles des victimes.
Il a qualifié le combat autour de Thiaroye de « combat pour l’âme du Sénégal et de l’Afrique ». Il a assuré qu’il ne ménagerait « aucun effort » pour garantir la transmission de cette mémoire aux générations futures.








